Qu'est-ce que le droit à l'information salariale ?
Le droit à l'information ne se limite pas à la possibilité de demander une enquête formelle : il remet en jeu les rapports de force sur le marché du travail. Toute personne qui postule à un emploi ou fait déjà partie des effectifs d'une entreprise disposera à l'avenir d'un pouvoir de négociation qui était jusqu'alors largement théorique.
Le droit à l'information comme nouvelle norme
Cette nouvelle directive européenne s'attaque aux distorsions structurelles qui perpétuent l'écart de rémunération entre les hommes et les femmes, notamment les plafonds de verre et les décisions opaques.
Le droit à l'information, introduit par cette directive, fait évoluer le débat : il ne s'agit plus de croire en l'équité salariale, mais d'être en mesure de l'exiger.
Désormais, les employeurs seront tenus d'expliquer clairement la manière dont la rémunération est déterminée et les possibilités d'évolution au sein des fourchettes salariales.
En cas de litige, la charge de la preuve s'inverse : lorsqu'il y a des allégations de discrimination ou des faits laissant supposer une telle discrimination, c'est à l'entreprise de démontrer la légalité de ses pratiques.
Ce nouveau postulat modifie les positions de négociation, la culture d'entreprise et la gestion des attentes.
Transparence des salaires : quels changements concrets pour les différentes parties prenantes ?
Les changements pour les employés
Les collaborateurs de l'entreprise peuvent exiger des informations claires sur leur propre rémunération. De plus, ils ont le droit de connaître les valeurs moyennes de leur groupe de pairs, et de comparer par sexe.
Ces groupes devront être constitués selon des critères objectifs : compétences, efforts, responsabilités et conditions de travail.
La directive adopte aussi une vision globale de la rémunération : salaire de base, primes, indemnités, heures supplémentaires, avantages en nature et retraite. Cette approche élargie vise à clarifier les variations entre les packages de rémunération globale.
Les changements pour les entreprises
- Les recruteurs devront indiquer un salaire de départ (au moins une fourchette) avant le premier entretien. Certains États membres peuvent même décider de faire figurer cette information directement dans les offres d'emploi.
- Par ailleurs, il est interdit de demander à un candidat son historique salarial. Ce changement rompt un cercle vicieux où un salaire initialement faible pouvait handicaper un candidat sur l'ensemble d'une carrière.
- La directive laisse peu de place aux déclarations d'intention. Les employeurs doivent veiller à ce que les informations soient disponibles sur demande et qu'elles soient effectivement comprises et appliquées.
- Les critères d'accessibilité et de compréhensibilité pour la détermination et la progression de la paie doivent être clairement énoncés, formulés, accessibles et compréhensibles pour tous les collaborateurs. Cela implique également l'obligation d'informer activement les collaborateurs de leur droit à l'information au moins une fois par an. Les entreprises qui s'engagent véritablement dans cette démarche font de la transparence salariale un pilier de leur culture, et non une contrainte subie.
Les changements pour les comités d'entreprise
Certains collaborateurs préfèrent ne pas s'adresser directement à l'équipe RH. C'est pourquoi la directive stipule expressément que les représentants du personnel, comme les comités d'entreprise, les syndicats ou les organismes chargés de l'égalité des chances, peuvent soumettre des demandes en leur nom. Cette approche donne plus de poids aux acteurs collectifs et retire la question de la rémunération de la sphère des conflits individuels.
Les changements pour les groupes d'entreprise
Le principe de comparabilité salariale homogène s'applique aux groupes de sociétés : lorsque les conditions de rémunération sont déterminées de manière centralisée à l'échelle d'un groupe, les collaborateurs peuvent exiger que l'évaluation comparative ne se limite pas à leur seule entité juridique, mais s'étende à l'ensemble des sites et filiales du groupe. Cela permet d'élargir le périmètre d'analyse. Ce qui était auparavant masqué par les frontières locales, sectorielles ou organisationnelles peut désormais faire l'objet d'une comparaison.